Critiques Mon avis sur le manga A town where you live

Mon avis sur le manga A town where you live

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En 2020, je veux me procurer Suzuka, un des premiers succès de Koji Seo. Mais au fil de mes recherches j’ai découvert un titre dont j’ignorais encore l’existence : A Town Where You Live. Un nom un peu improbable, long, en anglais, et me fait penser à ces mangas comme A Journey Behond Heaven dont le nom n’attire pas les faveurs du public tant il est peu accrocheur. Et cela se peu se vérifier ici même car je me répète, mais j’en avais jamais entendu parler alors que c’est son œuvre la plus longue à ce jour. Mais cela ne m’a pas empêché d’engloutir les 27 tomes en trois jours et malgré quelques longueurs, c’était excellent. Ce petit dépaysement à la campagne donne une bouffée d’air frais très appréciable et sais nous toucher. Cette délicate tranche de vie parlera forcément à toute une panoplie de lecteur avec une temporalité qui s’étale du lycée jusqu’au monde du travail. Cela permet également à l’auteur un tour de force en étant capable de nous toucher à plusieurs moments clés de notre vie. Et me concernant, je peux dire que Koji Seo m’a touché en plein cœur plus d’une fois.

J’ai essayé de résumé simplement le contexte du manga, mais je me suis emmêlé les pinceaux là où le résumé fournit par PIKA fait très bien le job :

“Haruto Kirishima est un adolescent qui coule des jours paisibles dans une petite ville de province au Japon. Sa vie est chamboulée le jour où Yuzuki Eba, la fille d’un ami de son père débarque de Tokyo et s’installe sous leur toit pour ses trois années de lycée. Haruto n’apprécie guère l’arrivée de cette étrangère dans sa maison et son lycée ! Il est bien décidé à la maintenir à l’écart de sa vie ! Malheureusement pour lui, alors qu’il fait visiter le lycée à Yuzuki, ils croisent la jolie Nanami Kanzaki, dont Haruto est secrètement amoureux ! Yuzuki, plutôt directe, annonce son installation chez le jeune homme, créant un quiproquo plus que gênant !”

Tout commence à Hiroshima

Tout nous amène très rapidement vers un triangle amoureux composé d’Haruto KirishimaYuzuki Eba et Nanami Kanzaki. Relation très classique avec les poncifs du genre mais qui pour moi passent extrêmement bien dans cette belle campagne d’Hiroshima. C’est d’ailleurs le moment du récit que j’affectionne le plus, au même titre que tout les chapitres secondaires qui se passe là-bas. Cette tranche de vie à la campagne avec des amourettes d’adolescents, franchement ça me parle, et j’ai adoré de bout en bout. Monter à deux sur un vélo pour aller au lycée, aller à la pêche pour s’amuser, les copains d’enfance toujours présents au quotidien. Tout me rappelle ma propre enfance et ce fût très simple de m’identifier à Haruto. J’aime beaucoup également la représentation des fêtes traditionnelles japonaises comme celle d’o-bon où les yukata sont de sortis. Koji Seo explique souvent dans ses livres que cette campagne est celle de son enfance, avec de nombreuses photos d’époque à l’appui. J’imagine que cela a grandement contribué à donné du corps et de la cohérence à son récit. Et si j’ai moins d’affect pour les autres arcs narratifs, il faut reconnaître que les triangles amoureux successifs où les rôles s’inversent par moment permettent de faire évoluer intelligemment le scénario.

La question des filles

Scénario proposant une petite subtilité qui fait la différence pour moi. En plus des triangles amoureux, les trois amis d’enfance composent un autre triangle qui laisse imaginer que cela évoluera vers des sentiments plus profonds. Mais le mangaka laissera seulement quelques indices au détour de chapitres originaux pour ne pas polluer la romance principale. Ils interviendront plus tard dans le récit et ne feront pas bouger les lignes du scénario. Mais ils m’ont particulièrement touché tant Koji Seo a frappé juste dans sa façon de le raconter.

Dernier point avant d’entrer dans le vif du sujet en décortiquant l’œuvre. J’ai envie de souligner que comme les autres mangaka, l’auteur nous régale les mirettes en dénudant régulièrement les personnages féminins. Mais à part dans les onsens où elles se retrouvent dans des positions qui ne servent qu’à titiller volontairement la gente masculine, c’est rarement lourd pour ce soit bienvenue. Ce que j’apprécie encore plus dans le trait de Koji Seo, c’est que c’est dans leur quotidien qu’elles sont les plus belles. Un soin tout particulier est apporté à Yuzuki, et il n’y a franchement pas besoin de la voir au onsen pour être amoureux d’elle.

Si je suis resté vague jusqu’à présent pour ne pas spoiler, on va maintenant aborder certains twists et thèmes dont l’auteur aime nous parler tout au long de l’aventure.

Le premier choc

Le premier arc narratif d’Hiroshima se focalise sur le triangle amoureux Yuzuki/Haruto/Nanami, et c’est Yuzuki qui attaque la première. Devant un Haruto qui déprime de ne pouvoir approcher Nanami, elle lui suggère clairement de tomber amoureux d’elle pour l’oublier. Du bon rentre dedans auquel je ne m’attendais pas du tout. J’imaginais plutôt un développement où Haruto et Yuzuki se rejettent avant de tomber amoureux. Mais j’ai eu la bonne surprise de me tromper ! J’avais aussi peur que l’histoire de Nanami tombe dans le cliché, mais sa relation avec Haruto est également plus riche que prévu. Si initialement elle le considère comme un simple ami, ses sentiments évoluent à mesure que l’intrigue avance. Je passe les détails anecdotiques, mais je vais vous parler du premier choc qu’à provoquer le mangaka chez moi. Après des semaines de travail, Haruto prend un beau râteau de la part de Nanami. Elle estime que Yuzuki prend trop de place dans la vie d’Haruto, ce qui se comprend car elle est tellement empotée qu’il doit tout le temps s’occuper d’elle. Mais c’est d’autant plus dur pour lui car il n’éprouve rien pour elle. Pour l’instant. Et le soir même, Yuzuki se rend compte de la détresse de son ami qui essaie tant bien que mal de la cacher, et elle le prend dans ses bras. Cela se passe très vite, en deux pages : je n’étais pas prêt. Je n’avais pas vu ladite détresse chez Haruto et j’ai du revenir en arrière pour m’en rendre compte et ainsi saisir la puissance de cette dernière planche. J’ai littéralement eu l’impression que Yuzuki me prenait dans ses bras. Je trouve d’ailleurs très appréciable que sa poitrine ne soit pas exagérée sur ce dessin pour vraiment laisser la place à un réconfort affectif pur.

La vie tokyoïte

Passé cette première partie très plaisante/contemplative/rafraichissante (j’insiste mais c’est vraiment le cas), Haruto se découvre des sentiments pour Yuzuki juste au moment où elle doit rentrer à Tokyo ! Quel con celui-là ! Elle le rejette au début car elle ne veut pas de relation à distance, mais elle l’aime tellement qu’elle s’en contentera. Après quelques péripéties, elle arrêtera tout simplement de lui donner des nouvelles. Ce sera l’occasion d’apprendre qu’elle l’a quitté pour un autre. On entre désormais dans un arc que j’aime moins, où Haruto déménage à Tokyo, et où les actions et sentiments des personnages principaux ne sont plus raccords avec les débuts du manga. Heureusement que le twist scénaristique est impossible à voir arriver. Je trouve d’ailleurs que c’est extrêmement malin de la part de Koji Seo. Avec l’arrivée d’Haruto à Tokyo pour reconquérir Yuzuki, il développe une intrigue annexe à l’histoire principale et recolle tous les morceaux en une page. Brillant !

Pour contextualiser, Haruto se fait deux nouveaux amis à Tokyo. Asuka, la voisine de sa sœur, et son ami Kyousuke. Ils se retrouvent tous les trois dans la même classe et deviennent rapidement amis. Asuka devient sa voisine de palier lorsqu’il emménage avec sa sœur et de fait il voit régulièrement Kyousuke dont la fougue et l’entrain redonnent un peu de motivation à Haruto. L’intrigue nous révèle rapidement que Kyousuke est malade, et cela semble anodin au début. Mais on apprend très vite qu’il est condamné ! Et lorsqu’on l’apprend, on se retrouve tous confronté à « l’horreur » de la prochaine planche. Yuzuki est la petite amie de Kyousuke !

Après ce coup dur, Haruto va mener une guerre psychologique contre Kyousuke pour reconquérir Yuzuki. Connaissant leur relation c’était à prévoir et cela amène des situations plutôt comiques. Et surtout, une réflexion profonde sur les choix de vie que peut faire une personne condamnée. Malgré la grande qualité d’écriture du personnage de Kyousuke, le fait que Yuzuki rejette Haruto à contre-cœur me déplaît. Cela fait parti des moments où l’auteur va volontairement à contre-sens de ce que les lecteurs veulent. Mais c’est peut-être nécessaire de faire avancer le manga et sans le faire tomber dans une certaine monotonie. Mais il faut saluer que l’intrigue est très bien ficelé. Les questionnements amenés par Kyousuke sont pleins de sens et en feront réfléchir plus d’un. Cet arc m’a subjectivement moins plu que le précédent, mais ça n’enlève rien à ses qualités.

Il en va de même pour la suite où Haruto sort avec Asuka. Je la trouve quelconque et qu’elle donne simplement l’impression d’être là pour nous faire patienter qu’Haruto et Yuzuki se retrouvent. Et je pense même qu’elle ne sert en fait qu’à ça. Car c’est la liberté qu’elle donne à Haruto qui va les pousser à se revoir. Et permettre au passage des chapitres vraiment chouettes. En particulier celui du speed dating qui dans le fond manque un peu d’originalité mais apporte ce qu’on voulait tous : le retour de Yuzuki et ce, de la même façon qu’avec Kyousuke. On se doute pas que cela peut être la dernière invitée, jusqu’à la case précédant son arrivée. Il est vraiment bon ce Koji !

Le retour à Hiroshima

Cette planche nous démontre une fois de plus le soin apporté à Yuzuki. Elle est passée de lycéenne à étudiante en même temps que le coup de crayon du mangaka, c’est impressionnant ! A partir de ce moment, leurs rencontres seront plus fréquentes, et le cœur d’Haruto va inévitablement basculer. Au début c’est simplement latent. Mais leur sortie au parc d’attraction et leur retour à Hiroshima pour les vacances d’hiver changer tout. En parlant du parc, j’ai adoré le clin d’oeil à Suzuka et Fuka pendant quelques cases. Très intelligemment placé, qui n’apporte rien à l’histoire, mais donne du lien et du sens à toute l’œuvre de l’auteur. Ce retour à Hiroshima est une bénédiction pour moi car on retrouve tout ce qui me plaisait au début de la série. Tous les copains sont là, c’est les vacances, la neige, et le retour des scènes où Haruto et Yuzuki se retrouvent seuls tous les deux. Une occasion également pour faire remonter Yuzuki sur le vélo d’Haruto pour nous donner une des plus belle planche du titre, aussi visuelle que pour ce qu’elle représente.

Désormais, nos tourtereaux ne se lâcheront plus, et Haruto devra par la même occasion rompre avec Asuka. C’est pas gentil mais, enfin ! Cela nous amène dans une partie où l’on voit la vie d’étudiante en couple sous toutes les coutures. Avec évidemment tout ce que ça peut impliquer comme longueur. Haruto et Yuzuki qui travaillent le soir, les repas à la maison, les cours à l’université, des je t’aime moi non plus. Même si dans le fond cette tranche de vie est intéressante, elle est beaucoup trop longue. Heureusement que leur nouvelle voisine vient mettre un peu de vie à tout ça ! Une fois qu’on a vu en long, en large et en travers leur vie quotidienne, l’heure est venue pour certaines personnes de grandir et de passer à la vie d’adulte. Et l’auteur va encore une fois nous proposer quelque chose d’incroyable en terme de dessin, de cadrage, et du temps qui passe qui parlera à chacun d’entre nous. Mais c’est tellement fort ce que j’ai ressenti que je ne sais pas si je vais réussir à l’exprimer.

La vraie vie, celle qu’on connaît tous un jour

Akari annonce a Haruto qu’elle va quitter Tokyo pour retourner à Hiroshima. Elle a trouvé un travail et va s’engager dans la vie active. Si Haruto lui reproche de décider ça tout seul dans son coin, il fini par lui souhaiter que du bonheur. Et toute la bande d’ami fini par l’accompagner à son train le jour de son départ. Déjà ça fait bizarre, on à l’impression de perdre quelqu’un de la bande (surtout que j’aime beaucoup Akari). Silence radio pendant plusieurs chapitres, et elle revient en proposant un rencard à Haruto. Pendant un déplacement professionnel à la capitale, elle lui annonce autour d’un repas qu’elle sort avec Narumi, le frère de Nanami (son amour de jeunesse). Après une courte discussion ils rentrent à l’appartement d’Akari. Après une douche elle se balade en serviette devant Haruto et finit par lui avouer qu’elle va sa marier. Elle lui avoue également qu’elle est amoureuse de lui depuis toujours. Ca aurait pu s’arrêter là, mais elle veut aussi lui faire l’amour pour pouvoir passer à autre chose. S’engager dans une nouvelle vie. Ce fût une petite gifle pour moi car je m’y attendais pas du tout. Mais après réflexion c’est tout à fait logique (je parlerai des deux baisers dans un futur article). J’ai trouvé cette scène très forte car elle intègre une réaction tout à fait humaine et réelle dans un récit où tout semble trop gros pour être vrai. C’est maintenant que le triangle d’amitié devient un triangle amoureux le temps de quelques chapitre. Un amour latent dont elle a besoin de se sortir pour pouvoir avancer dans sa future vie d’adulte. Si Haruto refuse catégoriquement sa proposition, il lui avoue néanmoins qu’un rien suffirait pour qu’il tombe amoureux d’elle, tellement c’est devenu une belle femme, au sens propre comme au figuré.

Le chapitre suivant, Haruto et Takashi jacassent en partageant un bon repas comme ils ne l’ont pas fait depuis longtemps. Ils passent leur temps à critiquer la fait qu’Akari se marie, et pour reprendre leur propre mot : c’est naze ! C’est un chapitre très drôle où on voit les deux héros dans une situation inhabituelle. On y comprend que le triangle amoureux existe depuis le début de leur amitié. Akari aimait Haruto et Takashi aimait Akari. Dans leur discussion, Haruto glisse que Takashi n’a jamais rien révélé pour ne pas détruire leur amitié. Mais ce dernier affirme que c’est bien Akari qui a sauvé leur amitié en mettant de côté ses sentiments pour Haruto. Encore une situation qui doit arriver dans bien de groupe d’amis et qui nous ramène à la réalité. Vient ensuite le mariage et le passage à la vie d’adulte pour Akari. Mais surtout le sentiment pour les deux grands garçons que leur amie d’enfance s’éloigne d’eux. Le flot d’image que les mariés passent pendant le repas retracent la vie d’Akari mais surtout son amitié avec Haruto et Takashi, dont elle sera le point d’orgue à la fin. Ces trois chapitres ont une aura très particulière et sont très bien racontés. Ils parleront quasiment à n’importe qui tant ce qu’il raconte est vrai et très bien amené. Ce fût un grand moment d’émotion supplémentaire pour ma part.

C’est déjà la fin…

Le dernier (et moins bon) gros morceaux du manga relate la fin des études des nos héros. De la recherche d’emploi d’Haruto et Yuzuki jusqu’à leur vie active. Je me suis pas senti concerné par le sujet, cependant il reste intéressant. Car si je connaissais leur rapport des japonais au travail, le stress que cette étape leur provoque m’étais inconnu. Personnellement j’étais comme Haruto, je m’en foutais un peu et je suis allé là où la vie m’a mené. Mais les déboires d’Haruto nous montrent combien la pression peut être dure pour les étudiants en recherche d’emploi. Je ne sais pas si ce que Koji Seo nous montre est représentatif de la réalité, mais je trouve que c’est très dur. Je me dis aussi que c’est peut-être comme ça chez nous mais que je ne m’en suis jamais rendu compte. Et c’est tant mieux.

J’espère que mon avis sur le manga A Town Where You Live vous a convaincu de rencontrer Haruto et compagnie. Première lecture pour moi de Koji Seo et je suis complètement conquis. Je n’ai évidemment pas parlé de tout, essentiellement de ce qui m’a touché. Mais nul doute que d’autres moments vous marquerons plus que moi. On a tous une sensibilité différente, mais globalement, tout le manga est de très bonne qualité. J’espère une réédition prochaine vu comme il est difficile de se les procurer d’occasion. Au revoir Haruto, au revoir Hiroshima. Au revoir Yuzuki.

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